jeudi 30 octobre 2014

OOZING WOUND - Earth Suck
Thrill Jockey

2014 / USA


"Trash"


http://www.thrilljockey.com/thrill/Oozing-Wound/Earth-Suck#.VFC1YldVLTA


Avec ce second album Oozing Wound s'impose comme un groupe phénomène, du genre à décidément te faire aimer son "trash" alors que tu n'aimes pas ça. En même temps, comme ils le disent: "Nous ne pensons pas sonner comme du trash. Il y a des passages métal mais nous ne jouons pas de solos et faisons tourner un seul riff encore et encore, ce que n'aiment pas la plupart des groupes de trash" qui auraient plutôt tendance, c'est clair, à entasser le plus de riffs et de notes possibles sur un disque. Et de conclure: "Lemmy n'a jamais pensé  Motörhead comme un groupe de métal; ils sont juste un groupe de rock et c'est aussi notre état d'esprit". Oozing Wound n'apprécie visiblement pas les étiquettes, ce en quoi ils n'ont pas tort étant donné que dans leur cas cela est effectivement réducteur. Car leur discours n'est pas faux: si la base de leur musique est tout de même plutôt orientée vers le métal, le fond, lui, dégage de forts relents noise, des effluves de sludge... On retrouve dans cet album, comme sur "Retrash", quelques passages de pure décharge d'adrénaline tel que Bury Me With My Money et ses 1 mn 30 s expédiées pied au plancher, dégagez l'autoroute, mais il est dans l'ensemble moins placé sous le signe de l'urgence, de l'instantanéité. L'énergie est mieux canalisée, domptée, ce qui apporte aux morceaux des ambiances plus massives, plus achevées. Les compos prennent davantage le temps de s'installer afin de mieux se développer. Cela leur confère une nouvelle dimension plus ample voire plus prenante et nous entraîne vers des sphères musicales plus étendues, plus riches avec des morceaux épiques comme When The Walls Fell ou encore False Peak qui nous ensevelissent littéralement sous des couches successives de riffs répétitivement assassins. Le trio a le bon goût de ne pas nous servir deux fois le même plat et nous prouve avec "Earth Suck" qu'il a vraiment des choses à exprimer et pas seulement une énergie débordante à décharger à tout prix. Il apporte indéniablement du sang neuf et sa pierre à l'édifice en ayant su créé son propre style, qui fonctionne à merveille et renouvelle le genre. Ni plus ni moins. Ce disque est tout simplement gigantesque et ce groupe diabolique. A se demander s'il n'a pas réellement passé un pacte avec qui vous savez...



mardi 28 octobre 2014

PORTERO REGATEADOR   / discographie
self released 
2012 - 2014 / ESP 

 Noise Electro Psyché


http://porteroregateador.bandcamp.com/album/mci
http://porteroregateador.bandcamp.com/


Depuis 2012, le quartet assène avec brio son " happening musical ". Sous l'égide de l'immédiateté celui-ci improvise, enregistre dans la foulée ses morceaux, jonchant ses longues plages électro-noise de courant psychédélique. Ils envoient un message fait de loops, de ruptures rythmiques (ainsi que de sons aux abords " autechrien " pour certains ). La soumission à un rythme organisateur hiérarchise les plans des autres instruments pour aboutir à une vision globale ;  une sorte de  "synthétisme" musical.  Avant-gardiste, Portero Regateador est atteint d'apoplexie alternative, où se développe une vitalité débordante, enthousiasmante, d'une candeur revigorante. Un bain de jouvence de créativité, de pulsations. La synergie , la sensibilité et la force qui s'en dégage met à mal bon nombre de groupes de ce courant ...  " Res U Men " est un composite  à base de divers enregistrements qui constitue du coup une belle approche pour oreilles en envie de découverte.  Mais ne vous arrêtez pas en si bon chemin , toute leur discographie vaut le détour.




vendredi 24 octobre 2014

RITUAL MESS - Vile Art
Clean Plate

2014 / USA

Hardcore Screamo


http://cleanplate.bandcamp.com/album/ritual-mess-vile-art
http://cleanplate.storenvy.com/


Rares sont les albums du genre qui me touchent vraiment tant nombre de ces groupes semblent confondre sensibilité et sensiblerie. Leur musique a malheureusement tendance a vite sombrer dans un pathos dégoulinant qui la rend insipide. Mais là, pour le coup, ça fonctionne carrément. C'est sans doute dû au fait que le quintet est loin d'en être à son coup d'essai et qu'il maîtrise son sujet, plusieurs de ses membres venant de "Orchid", groupe screamo de la fin des années 90-début 2000 et franchement fréquentable lui aussi. Ce qui ressort très rapidement et avant tout à l'écoute de ce disque c'est sa sincérité. On sent bien que les gars en veulent encore et toujours, qu'ils ne font pas semblant en se contentant d'appliquer une recette éprouvée. Les morceaux ont réellement une âme, incandescente. Ils te prennent aux tripes et te les retournent dans tous les sens ou te font l'effet d' uppercuts euphorisants. Marque du savoir-faire, ils réussissent à s'imposer sans en faire des tonnes, juste ce qu'il faut où il faut sans détours ni fioritures. Ce qui n'empêche pas la richesse et l'inspiration de compos qui procurent une impression de lave en fusion s'écoulant savoureusement dans ton cerveau consentant. La tension est tellement énorme qu'on se demande quand le son va réellement exploser. A consommer sans modération.



lundi 20 octobre 2014

SUN ARAW  / BELOMANCIE
Drag City 
2014 / USA 

 électro abstract funk

https://www.youtube.com/watch?v=MegfIYNQWXs
http://www.sunaraw.com/main.html
http://www.dragcity.com/products/belomancie

Cameron Stallones aka SUN ARAW défonce le clou avec un album d'un provocant abstract acido psyché funk . Le terme expérimental pour désigner sa musique n'est pas galvaudé, la dizaine d'opus sortie depuis 2008 en a déjà apporté la preuve. Avec  BELOMANCIE  il décompose les trames initialisées dans ses précédents albums. Le choix de l'épure  fait ressortir la quintessence en y sculptant d'autres aspérités de sa créativité ... Mêlant aussi bien de purs sons synthétiques qu'organiques et en utilisant le ressort de rythmes dignes des secousses d'un hochet chamanique, qui a pour but de permettre le changement du niveau de fréquence cérébrale,  il s'approche d'une mythification sonore proche d'un état de catharsis. L'expérience en est tout à fait troublante. SUN ARAW est d' autant plus important que le milieu de l'électro semble se satisfaire depuis quelques années de ses acquis. Il pourrait constituer la valeur ajoutée à ce milieu qui va enfin  refaire communier les sons et l'humain à l'unisson. A la manière de Richie Hawtin aka PLASTIKMAN ( dont le "petit" dernier EX est tout simplement magique ), il invente un autre langage ou code ... De quoi nous mettre la tête de lecture à l'envers !



YES I'M LEAVING - Slow Release
Homeless

2014 / AUS

Noise Rock

http://yesimleaving.com/
https://homelessvinyl.com.au/product/yes-im-leaving-slow-release/


Quatrième album, en 4 ans, du trio de Sydney qui continue à nous ravir et ne connait manifestement pas la baisse de régime. Ils ont beau être prolifiques, cela n'altère pas la valeur constante de leurs albums car bien qu'ayant une marque de fabrique très reconnaissable ceux-ci n'en sont pas moins tous différents. Ce nouvel effort est largement à la hauteur des précédents sans que l'on ne ressente, comme pour les autres, rien de forcé. On retrouve dans "Slow release" ce sens instinctif du rythme, à la vitalité communicative, qui donne imparablement l'envie de bouger dans le bon sens du terme. Les 11 morceaux s'enchaînent sans faiblir un seul instant et déchargent tout en une moyenne d'à peine 3 mn incendiaires. "Yes I'm Leaving" nous sert une noise qui se veut volontairement positive, légère et fraîche sans être simpliste ou décérébrée. Au contraire, il y a un réel contenu, du corps dans leurs compos et la qualité reste constante au fil des morceaux qui, c'est heureux, ne sont pas tous construits sur un schéma identique. Cette variété participe à maintenir l'intérêt tout au long du disque. Les gars réussissent l'exploit notable de nous concocter un rock mature à l'énergie juvénile, se permettant même des embryons de mélodies qui évitent habilement le parasitage en ne tournant pas à la mièvrerie. Et puis il y a ce chant qui n'a pas besoin d'emprunter la voix virile du rocker pour être crédible. Un album évident et un groupe qui se bonifie à chaque nouvelle création. 


lundi 13 octobre 2014

GRIZZLOR - When You Die - 
Money Fire Records 

2014 / USA

Noise Rock / Sludge


http://grizzlordestroys.bandcamp.com/album/when-you-die
http://moneyfirerecords.com/

T'en veux du sauvage bien barré mais qui ressemble à quelque chose ? Alors régale toi avec ce nouvel E.P de "Grizzlor", rejeton improbable du croisement aberrant d'un grizzly et de Predator, qui mâtine sa noise de sludge  histoire d'épaissir la sauce, de la rendre plus grasse  pour un résultat qui grince et râpe bien aux entournures. Excellent pour se décrasser les conduits auditifs. Adeptes du format court, parfait pour se faire les dents, ils ont aussi sorti en janvier dernier un E.P intitulé "We're All Just Aliens" portant bien son nom, fait d'une noise mutante et sidérale, ainsi qu'un E.P s/t en 2013 qui pose dés le départ les bases de leur univers cosmique. Tous deux sont aussi hautement fréquentables que leur petit frère. Mais la bestiole grandit vite et ce nouveau 7'' est encore plus brut, mordant que les précédents. Le Grizzlor a les crocs et le fait entendre. La cover est d'ailleurs sans équivoque. Un 4 titres consistant donc mais frustrant car à la longue le format court c'est bien mais c'est court ! A quand l'album ... En attendant tu peux toujours écouter les 3 galettes à la suite, ça le fait carrément.


mardi 7 octobre 2014

HANDS UP WHO WANTS TO DIE - Vega In The Lyre

Whosbrain - Art For Blind  - Learning Curve - Gabu - Triplejump

 2014 / UK

Noise Rock


 http://handsupwhowantstodie.bandcamp.com/album/vega-in-the-lyre


Enfin ! Après 2 ans et 7 mois d'une attente fébrile (eh oui, dans cet état chaque jour compte...) que j'ai vainement tenté d'apaiser en écoutant encore et encore et encore le traumatisant "Buffalo buffalo buffalo Buffalo buffalo", mes Irlandais préférés sont de retour. Et que me saisie alors une poussée d'anxiété. Vous voyez, la fameuse épreuve du second album... Le premier était d'entrée d'un tel niveau. Mais dés les premières notes de "Now beacon, now sea" et de sa basse  pilonnant tout, me voici rassuré. Et plus les titres défilent, plus la chair de poule me gagne et fait se dresser mon système pileux. J'y retrouve tout, cette batterie maniaque, inventive et généreuse, cette guitare discordante qui intensifie les morceaux, ce chanteur qui nous balance ses textes comme si sa vie en dépendait et cette basse, cette basse... "Huwwtd" nous revient, en très grande forme. Avec leur sens inné de la composition toujours aussi machiavélique et leur maîtrise absolue dans l'art de la tension, dans cette façon imparable de poser leurs morceaux pour mieux faire monter et exploser une pression qui nous lamine: déflagrations sonores de magnitude 11 sur l'échelle de nos tympans. Même les compos les plus "apaisées" portent en elles cette tension larvée insoutenable qui rend dingue. Pour autant "Huwwtd" ne nous sert pas 2 fois le même plat, loin de là. "Vega In The Lyre" sent encore plus l'urgence que son prédécesseur. Les compos, plus décharnées, dépouillées resserrent leurs propos comme une volonté d'aller toujours plus à l'essentiel, sur le fil du rasoir et sans filet. La production elle-même s'est faite plus aride avec un son plus sec, lourd, rugueux. La noise du quatuor y gagne un côté organique et l'album de la hargne, du mordant. Plus je l'écoute et plus je ressens, définitivement, ce sentiment d'un groupe vrai, pur et dur pratiquant une noise qui résiste, ne veut plier devant rien ni personne, fière et forte de sa différence. Un groupe unique et sans aucun doute, l'un des plus charismatiques de cette scène.

 

lundi 6 octobre 2014

JESSICA 93 / MISTRESS BOMB H - Salle de Shoot 
Bruits de Fond  / Kerviniou Recordz
2014 / FR 

http://kerviniourecordz.bandcamp.com/album/salle-de-shoot
www.bruitsdefond.org

Post Dark Wave / Expérimental Noise  

Pièce que je qualifierais de " Baudelerienne ", à la cohésion parfaite, "salle de shoot"  à  l'inverse d'un coffee shop n'a rien de convivial. Et même si   " L'invitation au voyage "  est alléchante elle finit bien souvent par un " De profundis clamavi ". Les deux one human band montrent toute l'ampleur de leurs univers. Une très belle réussite où l'on peut côtoyer tant l'ambiance de " Pornography " de The cure  que  " All artists are criminals" de Cha Cha Cohen. Et de confirmer toute la maestria de Jessica 93 ainsi que l'indiscutable personnalité de Mistress Bomb H.

Petite mort se déhanchant en ecstasy, chevauchant un reptile lové dans notre boîte crânienne, Jessica 93 injecte dans les deux premiers shoots une dark wave à la montée désincarnante. Compositions toujours aussi prégnantes, habilement et efficacement construites qui nous font poursuivre la visite de son monde de beauté et de désillusion. Avec " Déflation " Mistress Bomb H amorce la descente du trip et nous balance une vérité crue qui ne s'embarrasse pas d'une sensibilité masquant trop souvent une volonté de refouler la lucidité. Comme une désolidarisation neurobiochimique, l'enchevêtrement  de sons , de samples, de bruits s'agencent en de noires , froides , caustiques textures déstructurées intensément vivantes.

Le spleen et l'idéal ...

L'artwork d' EK Dojo, empruntant à l'iconographie du " Magicien d'Oz " le personnage de Dorothy Gale ( incarné par Judy Garland, grande addict devant l'éternel ) je ne peux m'empêcher de faire le lien avec le cultissime morceau " over the rainbow" , ses paroles sur le mal être et l'envie d'un ailleurs ... Oui mais voilà, pas d'illusoires échappatoires, reste nos pieds ancrés en terre et nos cerveaux défractés.